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Drépanocytose : un enfant de 13 ans traité avec succès par la thérapie génique

Vous ne serez plus seul(e) à lutter contre la drépanocytose

Drépanocytose : un enfant de 13 ans traité avec succès par la thérapie génique

Le Dr Marina Cavazzana, pionnière de la thérapie génique, a traité avec succès un enfant de 13 ans atteint de drépanocytose résistant à tous les traitements conventionnels. Une réussite qui n’est qu’un premier pas dans la lutte contre cette maladie, dont la prévention reste un volet essentiel.

Le Dr Marina Cavazzana, chercheuse, pédiatre et hématologue
BERNARD MARTINEZ POUR SCIENCES ET AVENIR

Le Dr Marina Cavazzana, chercheuse, pédiatre et hématologue, a le vent en poupe. Pionnière de la thérapie génique, elle a publié en mars 2017 dans le prestigieux New England Journal of Medicine un essai ayant permis de traiter avec succès un jeune garçon atteint de drépanocytose, la maladie génétique la plus fréquente au monde (12 000 malades en France, 5 millions dans le monde). C’est à l’occasion d’une rencontre à l’Institut Imagine, véritable extension de l’hôpital Necker Enfants Malades dédiée à la recherche où elle poursuit ses travaux, que le Dr Cavazzana (à laquelle Sciences et Avenir a consacré un portrait dans son n°848, en kiosque en octobre 2017) nous parle de ses projets et ambitions pour le futur.

Drépanocytose : une thérapie génique porteuse de nouveaux espoirs

La drépanocytose est une maladie génétique entraînant une malformation de l’hémoglobine, contenue dans les globules rouges, qui sert à transporter l’oxygène à travers le corps. Les symptômes comprennent des crises douloureuses causées par une mauvaise circulation sanguine et un manque d’oxygénation des tissus (surtout les os), une anémie et une sensibilité
aux infections. « Les drépanocytaires d’habituent à vivre dans la douleur, témoigne le Dr
Cavazzana, ça se lit sur leur visage sombre et renfermé ». Se déclarant dès la naissance, la drépanocytose raccourci dramatiquement la’espérance de vie des malades à « 45-50 ans, sans compter les hospitalisations ».

La thérapie génique : quand un premier échec devient succès

Afin de traiter le problème à la racine, le Dr Cavazzana s’investit dès la fin des années 90 dans le développement de la thérapie génique. L’idée est simple : puisque le problème vient d’un gène défectueux, il suffirait de le remplacer par un gène sain. Pour cela, le Dr Cavazzana prélève des cellules souches du patient sous anesthésie générale et les met en contact avec un virus modifié de façon à ce qu’il s’introduise dans les cellules malades et remplace le gène dysfonctionnel par une copie saine. Les cellules corrigées sont alors restituées au malade après une chimiothérapie destinée à tuer les cellules atteintes, afin que les saines les remplacent progressivement.

A l’époque en 2002, sur 10 bébés traités, 4 développent une leucémie et l’un d’entre eux décède. Malgré ce revers, la chercheuse n’abandonne pas : « de 1999 à 2006, les virus utilisés provenaient de la souris. On a fini par montrer qu’ils modifiaient les gènes voisins de l’endroit du génome où ils s’intégraient, ce qui entraînait les risques de cancer », explique-t-elle. « Aujourd’hui utilisons des virus VIH de 3e génération, qui n’ont encore jamais montré aucun effet toxique sur les plus de 200 patients ayant bénéficié d’une autogreffe par cette méthode. » En 2017, les résultats de la nouvelle méthode font du bruit: un enfant de 13 ans ne répondant à aucun traitement conventionnel montre au bout de 3 mois une production suffisante d’hémoglobine normale pour prévenir les complications graves de cette maladie. « Aujourd’hui, il se porte toujours bien, commente le Dr Cavazzana à Sciences et Avenir. Pour elle et les experts du domaine, bien que l’enfant montre encore quelques symptômes modérés, cela « constitue un résultat très prometteur ».

L’autogreffe de cellules souches corrigées, une méthode qui évite le risque de rejet

Cette procédure d’autogreffe nécessite plusieurs hospitalisations, notamment 3 semaines de surveillance appuyée pendant la période de destruction des cellules malades : à ce moment, les patients sont dépourvus de défenses immunitaires. « Le patient est son propre donneur, il n’y a donc plus de problématique de rejet comme avec les allogreffes », explique le Dr Cavazzana.

Car jusqu’ici, en dehors d’une prise en charge symptomatique, le seul traitement consistait en une greffe de moelle osseuse d’un donneur compatible – souvent de la famille – et était réservé aux malades les plus sévères. Cependant, cette méthode d’allogreffe comporte un risque de rejet du greffon non négligeable.

L’autre point clé en cas de généralisation de la thérapie génique, c’est le coût. « Un travail en cours montre que pour l’instant, la thérapie génique coûte le double d’une greffe allogénique en raison du prix du surnageant contenant le virus modifié, annonce le Dr Cavazzana, mais cela diminuera de moitié pour devenir équivalent dans les 2 prochaines années grâce aux avancées technologiques en cours ». Mais pour la médecin chercheuse, en dehors du traitement la mesure la plus importante est la prévention.

Diagnostic néonatal et dépistage systématique

La drépanocytose est une maladie génétique récessive, ce qui signifie qu’elle ne se déclare que si l’individu est homozygotes, c’est-à-dire s’il possède deux copies du gène malade. Ainsi, une personne ne possédant qu’une seule copie du gène malade, appelé hétérozygote, sera un porteur sain capable de transmettre le mauvais gène à sa descendance. Or, ces porteurs sains sont très répandus dans la population : si deux d’entre eux ont un enfant, celui-ci aura 25% de risques d’être malade.

« La meilleure chose à faire, dit le Dr Cavazzana, c’est de prévenir la naissance des 300 enfants qui naissent chaque année avec la maladie ». Pour elle, le « conseil génétique » est la clé. Il s’agira de dépister les hétérozygotes afin de les prévenir qu’ils ont 1 chance sur 4 que leur enfant soit malade et procéder à des diagnostics pré-natal et néo-natal. « Nous travaillons sur un essai en cours : bientôt, nous serons capables de diagnostiquer un hétéro ou homozygote en 1 minutes sur 1 goutte de sang », annonce-t-elle.

Source : Sciences et Avenir – 23/10/2017

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